Wave Trophy 2017 : la mobilité électrique sur les routes suisses

Le Wave Trophy, c’est le plus grand rallye de voitures électriques du monde. Depuis le 9 juin, et jusqu’au 17, son édition 2017 emprunte la route du Grand Tour de Suisse, itinéraire dont nous vous expliquions ici même qu’il avait été récemment équipé en bornes de recharge. L’occasion pour nous de s’intéresser au domaine de la mobilité électrique avec Jérôme Fresnay, concurrent de la compétition, et figure française de l’e-rallye.

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Roaditude – Jérôme Fresnay, vous êtes un passionné de voiture électrique. Pouvez-vous vous présenter pour nos lecteurs ?
Jérôme Fresnay – J’habite Rennes, en Bretagne. J’ai commencé à m’intéresser à la mobilité électrique en achetant une Prius hybride en 2006. Tout de suite conquis par les déplacements entièrement en mode électrique, j’étais un peu frustré de ne pouvoir profiter de ce mode en électrique que sur 2-3 kilomètres. J’ai donc acheté d’occasion, en plus, un Kangoo électrique première génération, de 2002, avec batteries Ni-Cd. Je possède toujours ces deux véhicules dont ma Prius, qui a 11 ans, et qui m’a procuré plein de plaisirs en participant, notamment, à toutes les éditions du Rallye de Monte-Carlo Energies Alternatives puis Energie Nouvelles, soit 9 participations consécutives avec le même véhicule. C’est la seule voiture qui a fait tous ces rallyes, et le record ne sera plus battu car l’Automobile Club de Monaco a décidé de remplacer, en 2016, ce rallye par un e-rallye avec des voitures sans émissions (hydrogène ou électrique). J’ai donc inauguré ce e-rallye en y participant l’année dernière dans un Kia Soul EV.

Vous participez au Wave Trophy 2017, la plus grande course de voitures électriques au monde. Quel est le principe de cette compétition ?
C’est d’abord le plus grand rassemblement de passionnés européens, et même mondiaux, de véhicules électriques (autos, camions, scooters, motos, vélos, etc..), que ce soient des véhicules disponibles dans le commerce, ou des véhicules thermiques convertis en électrique. En France, de telles conversions sont pratiquement impossibles à envisager à cause des lourdeurs administratives. Parmi ces passionnés, on retrouve aussi des industriels qui testent des technologies qu’on retrouve 2-3 ans plus tard sur le marché, comme, par exemple, le chargeur mobile AC triphasé – DC 22kW de DesignWerk.

Ce Wave Trophy est également un rallye touristique nous permettant de découvrir de magnifiques régions, ainsi que ses habitants, en empruntant de petites routes pittoresques. Il y a pas mal d’arrêts avec des animations qui facilitent la rencontre, et permettent de faire découvrir la mobilité électrique aux gens, notamment aux plus jeunes, car nous nous arrêtons dans pas mal d’écoles et de collèges. C’est avec cette génération de demain que les choses pourront évoluer… Les gens et les enfants sont fascinés par ces véhicules sans bruit, sans odeurs, sans émissions, et qui qui sont quand même des véhicules, vifs, rapides et très agréables pour se déplacer.

En tant que rallye, il y a bien sûr quelques épreuves de maniabilité, de connaissance du monde électrique, de connaissance des régions et villages traversés, de design/décoration de son véhicule, de fair play, etc… Tout cela pour établir, à la fin, des gagnants pour chaque catégorie.

Pouvez-vous nous présenter votre véhicule ?
Je vais participer au Wave Trophy 2017 avec ma C-Zero de 2012 qui a l’avantage, par rapport à mon Kangoo, d’avoir une meilleure autonomie, d’avoir des batteries sans entretien (Lithium-ion) et la possibilité de se recharger entièrement sur des bornes rapides en une heure (80% en 30 mn), ou sur une simple prise domestique. Les bornes rapides me seront bien utiles notamment pour le parcours d’approche Rennes-Zürich, que j’ai étudié précisément en fonction de ces bornes au standard CHΛdeMO.

C’est un véhicule neuf que j’ai acheté suite à une énorme opération de destockage du groupe PSA en 2012, et nous avons été quelques heureux à bénéficier de cette excellente affaire. Depuis, je suis ambassadeur pour la e-mobilité, et je conseille bénévolement les collectivités locales, les syndicats d’énergies pour développer l’implantation de bornes de recharges dans les départements bretons où je vis. Je participe donc à de nombreux rallyes également en France, mais aucun n’a la taille et la durée du Wave Trophy.

Jérôme Fresnay, avec sa belle.

Jérôme Fresnay, avec sa belle.

L’édition 2017 du Wave Trophy emprunte le parcours du Grand Tour de Suisse – 1600 km autour du pays. Connaissez-vous cet itinéraire, et quel est le tronçon qui vous réjouit le plus ?
J’ai souvent rêvé au Grand Tour de Suisse et ses fabuleux paysages… D’ailleurs, le site Internet qui présente cet itinéraire est si bien fait qu’on a vraiment envie d’y aller. C’est une route que je trouve mythique…

Je m’étais juré d’aller y passer mes vacances, quand j’ai appris que l’itinéraire allait être une route entièrement électrifiée d’ici fin avril 2017, avec des bornes de recharges rapides. Ca me donnait vraiment envie d’y aller. Et j’apprends que le Wave Trophy s’y déroulerait cette année… Traverser ces montagnes, ces cols, ces lacs, sans bruit et sans émission, quel bonheur ! Cela dit, je ne connais pas vraiment la région. Je suis venu une fois en Suisse du coté de Zermatt et lors du Wave Trophy 2014, nous étions passés au col du Furkapass et à Saas Fee. J’avais adoré…

Les performances des voitures électriques sont-elles vraiment adaptées aux dénivelés de la topographie suisse ?
On entend souvent que les véhicules électriques sont plus pour la plaine, la ville, la campagne. La première fois où je suis allé en montagne en VE, je n’étais pas trop fier. Est-ce que j’aurai assez d’autonomie pour arriver au sommet ? De plus, avec l’attitude, certaines routes étroites, voire certaines épingles à cheveux, ce n’est pas évident pour les gens du bord de mer… Mais, une fois arrivés au sommet, même si votre jauge est pratiquement à 0%, la descente permet de régénérer les batteries et de récupérer 50 à 60 kilomètres d’autonomie en fonction du dénivelé, du véhicule… Mais il est vrai que la première fois qu’on monte un col, il faut bien connaitre son véhicule pour ne pas trop stresser…

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Les concurrents du Wave Trophy de passage sur le col historique du Gothard.

Les concurrents du Wave Trophy de passage sur le col historique du Gothard.

L’électricité, c’est sans doute l’avenir de l’automobile… Quels sont les derniers obstacles à franchir pour que cela soit véritablement le cas ?
Les gens disent : le prix et l’autonomie. L’autonomie est un faux problème : il faut un véhicule adapté à vos besoins. Ma C-Zéro, je l’utilise tous les jours, c’est devenu mon véhicule habituel. Ma Prius de 11 ans, qui fonctionne à l’E85, je ne l’utilise que pour les grands trajets, les déplacements inhabituels. Je pourrais avoir un véhicule avec 500 kilomètres d’autonomie. Sauf que le véhicule serait très cher, la batterie très lourde, et si c’est pour faire uniquement des trajets quotidiens de 30-50 kilomètres, la C-Zéro est suffisante. A quoi cela sert de déplacer quotidiennement une tonne de batterie si 300 kilogrammes suffisent ?

Un des principaux obstacles pour la mobilité électrique, c’est le réseau de charge. Il n’y a pas assez de bornes rapides DC (Courant Continu – Direct Current). Ces bornes permettent à tous les véhicules de se recharger rapidement lors de grands déplacements en très peu de temps. En France, les régions préfèrent installer des bornes AC, moins chères, mais qui ne seront utilisés que rarement lors des grands déplacements car avec les bornes AC, c’est le chargeur interne du véhicule qui va transformer le courant AC en DC, et c’est lui qui va décider de la vitesse de recharge (sauf pour la Zoé de Renault). Ces bornes AC sont utiles mais uniquement lors de recharges ponctuelles, lorsque vous allez au supermarché, au restaurant, au cinéma, mais pas lors de grands déplacements.

Enfin, l’autre frein actuel au rechargement, c’est la multiciplicité des badges différents de recharge. Chaque réseau, chaque région a le sien, et si on veut se déplacer, il faut avoir presque 10 badges, 10 applis sur son smartphone, etc. Elon Musk et Tesla l’ont bien compris, leur réseau de recharge est très bien conçu, rapide, sans badge, très simple. Disons qu’un véhicule avec 300 km d’autonomie réelle et un bon réseau de recharge rapide et dense ferait vraiment avancer la mobilité électrique.

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Pour en savoir plus sur le Wave Trophy : site Internet
Pour en savoir plus sur le Grand Tour de Suisse : site Internet

(Interview : Laurent Pittet, Nyon, Suisse / Crédits photo : Jérôme Fresnay, Marc Charmey, Wave Trophy)