« L.A. Tea Time », ou les affres de la création

Pour son nouveau long métrage documentaire, présentéen première mondiale la semaine passée au festival Visions du Réel, la cinéastequébécoise Sophie Bédard Marcotte nous emmène sur la route, pour un film mêlantréflexion artistique, fantaisie et… éloge de l’ennui. 

La jeune réalisatrice et sa directrice de la photographie en ont marrede l’hiver montréalais, et suite à quelques revers, notamment amoureux,décident de prendre la route en direction du sud : le but de leur voyageest d’aller à Los Angeles rencontrer la cinéaste et musicienne Miranda Julypour profiter de ses conseils professionnels.

Bande-annonce du film, présenté en première mondiale à Visions du Réel.

De bon coeur
Les deux jeunes femmes filment alors tout et n’importe quoi sur leur trajet : des cowboys rassemblant un troupeau, des séances de méditation, les nuits dans les motels, un gérant de magasin marrant et salace sur la route 66… Et bien sûr quelques paysages grandioses. Très vite, on comprend que ce road movie est un prétexte à une réflexion très féminine sur la notion même de création et sur la quête d’un sujet. Sorte de film sur le film, L.A. Tea Time se révèle alors comme une expérience originale, souvent drôle (le public dans la salle ne s’y est pas trompé, et a ri de bon cœur), un work in progress fantaisiste et erratique.

Dès le début, le voyage sert de prétexte à diverses rencontres plus oumoins burlesques, et l’ajout de petites animations (un halo rose incrusté dansle ciel auquel la cinéaste adresse ses interrogations, des villes descience-fiction au loin dans le désert…) confère une ambiance contemplative,presque fantastique au documentaire. Reste qu’un sentiment d’ennui a fini par gagner votre serviteur : L.A TeaTime, bien que sympathique, a tendance à mettre un peu trop en scène l’inaction paresseuse des deux protagonistes – elles roupillent, picolent, somnolent dans un jacuzzi…

Humilité
Bien entendu, il s’agit du sujet même du documentaire, mais l’expérience se révèle un peu pesante à la longue. Heureusement, Sophie Bédard Marcotte évite l’écueil de la démonstration ou de la pontification, et son détachement méditatif, son absence d’ego et son humilité confèrent une certaine grandeur au film. Une cinéaste à surveiller de près, donc.


L.A. Tea Time (2019), un film de Sophie Bédard Marcotte, Maestro Films, Canada, 2019.

(Texte : Nicolas Metzler / Créditsphotos : Maestro Films)